
Rejet d'un contredit formé contre un jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saumur
Dernière modification le 31/01/2019
Cour d’appel d’Angers
Chambre sociale
Audience publique du 5 juin 2012
N° de RG: 11/03071
Déclare la demande ou le recours irrecevable
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL
D’ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N
CLM/SLG
Numéro d’inscription au répertoire général : 11/03071
numéro d’inscription du dossier au répertoire général de la juridiction de première instance
Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes - Formation paritaire de SAUMUR, décision attaquée en date du 08 Novembre 2011, enregistrée sous le no 10/00107
CONTREDIT
ARRÊT DU 05 Juin 2012
APPELANT :
Monsieur Mohamed X...
...
91100 CORBEIL ESSONNES
présent, assisté de Maître Emily MENGELLE, avocat au barreau d’ESSONNE
INTIMEES :
Société LA SOCIETE GENERALE DU BATIMENT
Monsieur DGHIME Yassine
2 rue du Doyenné
72000 LE MANS
représentée par Maître Houcine BARDI, avocat au barreau de PARIS
Société SOL’ERE
11 rue des Mariniers
49160 ST MARTIN DE LA PLACE
représentée par maître Arnaud BARBE, avocat au barreau d’ANGERS (ACR)
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 27 Mars 2012 à 14 H 00 en audience publique et collégiale, devant la cour composée de :
Madame Catherine LECAPLAIN-MOREL, président
Madame Brigitte ARNAUD-PETIT, assesseur
Madame Anne DUFAU, assesseur
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame LE GALL, greffier
ARRÊT :
du 05 Juin 2012, contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par madame LECAPLAIN MOREL, président, et par Madame LE GALL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
Exposant avoir été lié par un contrat de travail verbal, soit à la société La Générale du Bâtiment, soit à la société SOL’ERE pour avoir travaillé pour leur compte sur des chantiers, en qualité d’électricien, du 8 février au 24 avril 2009, les 18 et 19 mai 2009, le 21 juillet 2009 et le 25 novembre 2009, date à laquelle il a été victime d’un accident du travail non déclaré, par lettre postée le 4 août 2010, M. Mohamed X... a saisi le conseil de prud’hommes de Saumur afin de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et d’obtenir diverses indemnités au titre de la rupture, ainsi qu’un rappel de salaire et des indemnités de grand déplacement.
Invoquant une relation de sous-traitance, les deux sociétés défenderesses ont contesté avoir jamais été liées au demandeur par un quelconque contrat de travail et elles ont soulevé l’incompétence matérielle du conseil de prud’hommes de Saumur au profit du tribunal de commerce de Bobigny.
Par jugement du 8 novembre 2011 auquel le présent renvoie pour un ample exposé, le conseil de prud’hommes de Saumur s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce ainsi désigné, a débouté les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile et condamné M. Mohamed X... aux dépens.
Ce dernier a formé contredit par acte motivé daté du 23 novembre 2011 transmis au secrétariat greffe du conseil de prud’hommes, d’une part, à cette date par télécopie, d’autre part, par lettre recommandée postée le 23 novembre 2011, parvenue au greffe le lendemain.
Le secrétariat greffe a délivré récépissé de la remise du contredit le 24 novembre 2011 et, le jour même, il a notifié une copie de ce contredit à la société La Générale du Bâtiment et à la société SOL’ERE.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Aux termes de son contredit de compétence remis au greffe du conseil de prud’hommes et de ses écritures déposées au greffe de la cour le 5 mars 2012, repris oralement à l’audience, ici expressément visés et auxquels il convient de se référer, M. Mohamed X... demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris, de déclarer son contredit recevable et bien fondé, et de juger que le conseil de prud’hommes de Saumur est bien matériellement compétent pour connaître de ses prétentions.
A l’appui de sa position, il expose que :
- suivant contrat de travail à durée indéterminée verbal du 9 février 2009, il a été embauché par la société La Générale du Bâtiment en qualité d’électricien pour intervenir sur un chantier situé à Le Truel (12) ; lorsqu’à l’issue de ce chantier, il a réclamé son salaire, la société La Générale du Bâtiment en a soumis le paiement à la condition qu’il aille sur un autre chantier, de sorte qu’il a travaillé à Chalons en Champagne (51) les 18 et 19 mai 2009 ;
- qu’il n’a pas plus été rémunéré et, a été soumis au même chantage à deux reprises encore ce qui l’a conduit à réaliser un chantier à Saint-Maur des Fossés (94) le 21 juillet 2009, et à ORSAY (91) le 25 novembre 2009, date à laquelle il a été victime d’un accident du travail qui n’a pas été déclaré car son emploi n’avait pas été déclaré et que le salarié à l’origine de cet accident n’était pas titulaire d’un titre de séjour et d’une autorisation de travail ;
- qu’ultérieurement, il a découvert que l’entreprise en charge des trois derniers chantiers était la société SOL’ERE dont il indique qu’elle a des liens de fait avec la société La Générale du Bâtiment.
En réponse à l’irrecevabilité du contredit soulevée par les sociétés intimées, M. X... oppose qu’en l’espèce, le délai de quinze jours imparti par l’article 82 du code de procédure civile pour la remise de son contredit au greffe du conseil de prud’hommes expirait le 23 novembre 2011 à 24 heures ; qu’en l’occurrence, ce délai a bien été respecté puisqu’il a transmis son recours par télécopie du 23 novembre 2011, laquelle a été reçue à 15h46.
Au fond, il soutient qu’il était bien lié à la société La Générale du Bâtiment par un contrat de travail en ce qu’il est intervenu sur le chantier de Le Truel sous l’autorité hiérarchique de M. Moncef C... qui exerçait les fonctions de chef de chantier pour cette société, tandis qu’ensuite, c’est M. Sami X..., autre représentant de cette entreprise, qui lui donnait des directives. Selon lui, s’il apparaît comme sous-traitant sur le compte-rendu de chantier no2, c’est parce qu’il était le salarié de la société La Générale du Bâtiment, elle-même sous-traitante de la société SOL’ERE.
Il argue encore de ce que la rémunération forfaitaire convenue entre lui et l’employeur n’exclut pas un contrat de travail. Il ajoute que la circonstance qu’il ait apporté ses outils n’est pas non plus un indice exclusif du contrat de travail en ce qu’une telle pratique est usuelle dans le bâtiment.
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 9 février 2012, soutenues oralement à l’audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société SOL’ERE soulève l’irrecevabilité du contredit au motif qu’expédié par lettre recommandée le 23 novembre 2012, il a été mis en possession du greffe le 24 novembre seulement, soit hors délai.
Aux termes de nouvelles écritures enregistrées au greffe le 9 mars 2012, soutenues oralement à l’audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société SOL’ERE maintient à titre principal l’irrecevabilité du contredit et, conclut à titre subsidiaire à son rejet au fond soutenant que la juridiction compétente pour régler le conflit qui l’oppose à M. X... est le tribunal de commerce de Bobigny.
Elle sollicite une indemnité de procédure de 1500 € et la condamnation de l’appelant aux entiers dépens.
Sur l’irrecevabilité du contredit, elle argue de ce que la lettre recommandée avec demande d’avis de réception est parvenue au greffe le 24 novembre 2011 et que c’est à cette date qu’a été établi le récépissé du contredit.
Il soutient que l’article 82 du code de procédure civile s’entend de ce que l’acte de contredit doit être effectivement remis au secrétaire greffier et il oppose qu’en l’espèce, cette remise n’a pas eu lieu le 23 novembre puisque le cachet apposé, lequel, selon lui, seul peut faire foi, atteste de ce que le greffier n’a été mis en possession du contredit que le 24 novembre. Il estime que la télécopie ne peut pas en elle-même faire preuve d’une remise en ce que les dates et heures qu’elles portent sont seulement des dates et heures d’émission.
Au fond, si elle reconnaît avoir eu recours aux services de M. Mohamed X... en sa qualité d’électricien pour des travaux à réaliser sur des chantiers, elle soutient qu’il est intervenu en qualité de sous-traitant après s’être présenté à elle comme travailleur indépendant, et elle dénie tout lien de subordination.
Elle argue de ce qu’il n’a jamais été intégré à ses équipes, ni à un horaire collectif de travail, ni d’ailleurs à un quelconque horaire de sa part ; de ce qu’il n’a jamais reçu d’instructions de M. C... mais seulement des indications globales lui permettant de réaliser ses prestations “en intelligence avec la réalisation du marché”.
Aux termes de ses écritures déposées au greffe le 27 mars 2012, soutenues oralement à l’audience, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer, la société La Générale du Bâtiment demande à la cour de rejeter le contredit, de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Saumur en ce que la juridiction s’est déclarée incompétente au profit du tribunal de commerce de Bobigny et de condamner M. Mohamed X... à lui payer la somme de 1 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle oppose que M. X... ne rapporte pas la preuve du contrat de travail dont il se prévaut, notamment celle de l’existence d’un lien de subordination entre eux, lien qu’elle conteste absolument.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu qu’aux termes de l’article 82 alinéa 1er du code de procédure civile, “Le contredit doit, à peine d’irrecevabilité, être motivé et remis au secrétariat de la juridiction qui a rendu la décision dans les quinze jours de celle-ci.” ;
Que ce texte pose deux conditions de recevabilité, la première tenant à la motivation du contredit, et la seconde au délai imparti pour sa remise au secrétariat de la juridiction qui a rendu la décision, le défaut de motivation et le dépassement du délai imparti pour la remise du contredit étant sanctionnés par l’irrecevabilité du recours ;
Attendu que le délai de quinze jours commence à courir à compter du lendemain du prononcé de la décision et expire le dernier jour à 24 heures ; qu’en l’espèce, le délai de quinze jours a donc commencé à courir le mercredi 9 novembre 2011 et expirait le mercredi 23 novembre 2011 à 24 heures ;
Attendu que M. Mohamed X... justifie tout d’abord avoir adressé son contredit au secrétariat du conseil de prud’hommes de Saumur par télécopie expédiée le 23 novembre 2011 à 15 h 46 et réceptionnée le même jour à 15h48, étant observé que cette télécopie, dont l’envoi n’est toutefois pas contesté par la partie adverse, ne se retrouve pas au dossier du conseil de prud’hommes ;
Mais attendu, en tout état de cause, que le contredit ainsi formé par télécopie est irrecevable en ce qu’une télécopie n’a pas pu valablement saisir la présente la cour (Cass. civ. 2 10/02/2011pourvoi no 10.15-332) ;
Et attendu que le contredit valablement formé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception est néanmoins tout aussi irrecevable pour dépassement du délai imparti pour sa remise au secrétariat du conseil de prud’hommes de Saumur ; qu’en effet, cette lettre postée le 23 novembre 2011 est parvenue au secrétariat le 24 novembre 2011 ; que la remise du contredit est donc intervenue le lendemain du jour d’expiration du délai imparti par l’article 82 du code de procédure civile ;
Attendu que M. Mohamed X... sera condamné aux dépens de la présente instance sur contredit et à payer à chacune de la société La Générale du Bâtiment et de la société SOL’ERE une indemnité de procédure de 500 €, soit, au total, 1000 € ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant sur contredit, publiquement, par arrêt contradictoire,
Déclare irrecevable le contredit formé par M. Mohamed X... à l’encontre du jugement du conseil de prud’hommes de Saumur du 8 novembre 2011 ;
Condamne M. Mohamed X... à payer à chacune de la société La Générale du Bâtiment et de la société SOL’ERE la somme de 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, soit au total, 1.000 € ;
Le condamne aux dépens de la présente instance sur contredit.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Sylvie LE GALL Catherine LECAPLAIN-MOREL
Titrages et résumés :